Cents vues d’Edo, chef-d’œuvre ultime d’Hiroshige (1797-1858) composé les deux dernières années de sa vie, rassemble 119 estampes consacrées à sa ville natale, Edo, devenue Tōkyō en 1868. Il relève du genre des meisho-e (« peintures de vues célèbres ») célébrant les paysages japonais, et illustre la maturité de l’art de Hiroshige, où l’abstraction et la composition prennent davantage de place. Souhaitant « peindre des paysages que l’observateur peut voir de ses propres yeux » (Souvenirs illustrés d’Edo), Hiroshige emploie le format vertical et compose des images dont la précision topographique s’efface quelque peu sous des cadrages insolites, les agrandissements dramatiques et la vivacité des couleurs.
À cet effet, il recourt à la technique nishiki-e, « estampe de brocart », nécessitant plusieurs planches de bois gravées et permettant d’utiliser de nombreuses couleurs différentes et d’obtenir un rendu détaillé. Ces estampes en grand format (ōban), groupées selon les saisons de l’année, adoptent ainsi le point de vue de l’humain qui contemple le paysage, et laissent affleurer l’émotion.